Judo International: Voix du Japon par Gotaro Ogawa

Règles de compétition: Le Japon fait cavalier seul
Gotaro OGAWA ( le 15 juillet, 2009 )

Dans le processus de l’internationalisation du Judo, la pratique de la compétition a beacoup changé depuis les orignes. Bien que le Japon suive les règles internationales, les Judokas japonais sont malheureux. Par coséquent, ils maintienent chez eux certaines règles traditonnelles dans le cadre de leurs compétitions nationales.
Pour eux, le Judo est un art martial, ce qui doit se traduire par un duel sans conditions. Plus concrètement, un vrai combat de Judo doit être mené sans catégories de poids. C’est ainsi qu’on pourra assister aux moments spectaculaires où un petit combattant projètte un adversaire plus grand, ce qui représente l’une des bonnes caractèristiques du Judo. Les Japonais considèrent généralement que le système actuel des catègories de poids dans les compétitions a tué, en quelque sorte, ce trait fondamental. C’est pour cela que le Championnat du Japon de Judo a été toujours mené sous forme de « toutes catégories ».
En avril dernier, je suis allé voir le Championnat du Japon et j’aimerais présenter ici une petite analyse tout en mettant l’accent sur la différence de poids. Nous verrons ci-dessous dans quelle mesure la différence a affecté ou non le résultat de la compétition.
Une autre critique qu’on entend souvent au Japon à l’égard de règles de jeux internationales de Judo est que l’importance de NEWAZA( combat au sol ) est quelque peu négligée. De ce point de vue, il serait intéressant de jeter un coup d’oeil sur un tournoi de Judo annuel dans lequel le NEWAZA en constitue l’aspect majeur. Nous l’analyserons en seconde partie.

Outrre l’élément du poids, j’ai souvent l’impression que les compétitions de Judo au Japon présentent des caractéristiques différentes de celles qu’on observe à l’étranger comme suit:
① Il y a peut-être plus de matchs décidés par IPPON.
② L’intervalle de temps avant que les arbitres prononcent MATE est plus long et moins fréquant, surtout au NEWAZA ( combat au sol ). Une déclaration de MATE prématurée en NEWAZA risque de stopper le processus d’entrer dans l’OSAEKOMI ( immobilization ).
③ L’on voit plus fréquemment les deux adversaires se saisissent le kimono plutot que d’empêcher l’adversaire de saisir.
④ Les arbitres accordent un temps plus long pour que les combattants se redressent correctement, ce qui, je pense, contribue à créer une atmosphère incitant les combattants de montrer un comportement plus courtois.

Ainsi regarder de près les différentes formules de compétitions de Judo au Japon pourra donner une opportunité de réfléchir sur la façon dont on peut améliorer les règles de jeux internationales de compétition.

Se maintenir dans le principe de la formule « toutes catégories »: une brève analyse du Championnat du Japon de Judo 2009

Le Championnat du Japon se tient tous les ans le 29 avril. Depuis le commencement en 1948, ce tournoi s’est toujours disputé sous la forme de « toutes catégories » à savoir sans classement de poids. Suivant la philosophie traditionnelle du Japon, la différence de poids ne devrait pas être prise en compte dans les arts martiaux.
En effet, ici aussi, les poids des 38 participants du Championnat étaient très différents. Le plus léger ( M. UCHISHIBA, médaillé d’or aux Jeux olympiques d’Athènes et de Pékin, catégorie -66kg ) pesait 69 kg, alors que le plus lourd( M. KATO ) accusait 155 kg sur la balance. Le Champion du Japon de cette année M. Takamasa ANAI, vainquer du championnat international en Allemagne au mois de février dernier, pesait 100 kg.
Je me permets de présenter ici une étude numérique qui pourrait être intéressante pour nos lecteurs.
Parmi les 37 matchs de ce tournoi, 27 étaient disputés entre deux combattants dont la différence de poids était supérieur à 10 kg. Or 13 des ces 27 matchs( donc à peu près la moitié ) ont été gagnés par le combattant avec un poids inférieur.
La liste ci-dessous montre de principaux résultats de ces 13 combats ( Le nom souligné désigne le vainqueur. Les chiffres entre parenthèses indiquent le poids. Les chiffres à droite représentent la différence de poids entre les deux adversaires. )

Kato ( 155 ) vs. Saito ( 92 ) 63
Nishiyama ( 90 ) vs. Wanifuchi (135 ) 45
Iwata ( 93 ) vs. Konno ( 135 ) 42
Hongo ( 100 ) vs. Kanzawa (130 ) 30
Tsujita (130 ) vs. Inomata (100 ) 30
Matsumoto (80 ) vs. Toyoshima ( 105 ) 25
Katabuchi ( 125 ) vs. Anai ( 100 ) 25
Anai ( 100 ) vs. Muneta ( 125 ) ( finale ) 25
Shoda ( 120 ) vs. Anai ( 100 ) ( demi-finale ) 20
Une des observations que l’on poura faire sur la base de ces chiffres est que la différence de poids n’a pas affecté de manière décisive les résultats de compétitions tout au moins en ce qui concerne le championnat de cette année. Il n’y a pas de raison de penser que ce résultat a été exceptionnel. En effet, une analyse similaire menée cette année au Championnat universitaire du Japon par équipe de 7, toutes catégories, avec des poids variant de 60 à 185 kg, montre aussi un taux de victoire du plus léger proche de 50%.
Dans le cas du Sumo ( la lutte japonaise traditionnelle ), nous les Japonais nous émerveillons souvent devant des combats entre deux adversaires avec une différence de poids considérable dans lesquels le plus léger projette son adversaire plus lourd avec des techniques spectaculaires. Je suis un de ceux qui considèrent qu’il serait bon de réduire, -sinon supprimer totalement-, le nombre des catégories de poids dans les compétitions internationales de Judo. Cette modification de règles de jeux pourrait recréer un Judo un peu plus proche de son caractère original, dont les Japonais aiment souvent décrire l’idée par « Juu yoku go wo seisu ( 柔よく剛を制す ) » à savoir, la souplesse peux conquérir la force. La réduction du nombre de catégories de poids encouragerait les participants aux combats d’apprendre des techniques souples et rapide, susceptibles de triompher d’adveraires plus lourds, ce qui pourrait contribuer au développement de techniques plus diverses. Les compétitions de Judo deviendraient ainsi plus intéressantes et spectaculaires.
Maître Isao OKANO, ancient médaillé d’or aux Jeux olympiques de Tokyo en 1964 ( catégorie – 80 kg ), et deux fois champion du Japon en 1967 et 1969, a remarqué récemment qu’on pourrait faire ressortir les meilleurs aspects de Judo, par exemple, par une réduction de nombre de catégories de poids ou par l’introduction d’une nouvelle règle permettant les combattants de participer aux classes de poids supérieure ( exemple: celui qualifié dans la catégorie – 66 kg participe dans la classe -73 kg ou au dessus ).

S’attacher au NEWAZA ( travail au sol )

Bien que ce ne soit pas un événement majeur au Japon, l’un des tournois de Judo inter-universitaires attire particulièrement l’attention des amateurs de Judo à cause de ses règles de compétition uniques visant à permettre le NEWAZA de se manifester au maximum.
Je suis allé voir le 58ème Championnat de Judo entre sept universités le 13 juin au Kodokan. Ce championnat annuel est disputé entre les sept universités nationales appelées anciennement « impériales ». Or je suis moi-même un ancient élève de Judo Club de l’Université de Tokyo qui fait partie de ce groupe de sept universités. Je me souviens bien que dans nos entraînements quotidiens il y a une quarantaine d’années nous consacrions une part considérable du temps au travail au sol apprenant de diverses techniques intéressantes, voire même subtiles. Le NEWAZA fut une partie très importante dès le commencement de Judo. Les critiques sont nombreuses au Japon, notamment parmi les Judokas de vieille génération, concernant la tendance récente à négliger l’importance de NEWAZA. Le championnats de sept universités est, à ma connaissance, le seul tournoi national dans lequel le NEWAZA constitue un élément majeur de compétition.

Afin de mieux le comprendre, il serait bon de récapituler ici quelques principales règles de jeux qui sont différentes de celles de compétitions ordinaries.
① Il s’agit de compétition par équipe de 15 joueurs.
② Le joueur gagnant continue le match alors celui qui perd ou fait match nul se retire.
③ La décision de match est fait uniquement lorsque l’un des deux combattants marque l’IPPON ou deux WAZA-ARI, un seul WAZA-ARI ne signifiant que match nul. Il n’y a pas de YUKO: On ne compte que IPPON ou WAZA-ARI.
④ HIKIKOMI ( l’acte d‘emmener l’adversaire au sol sans appliquer de technique de projection ) est admis.
⑤ Quand les deux joueurs, se battant au sol, sortent de tapis de combat ( JOGAI ), ils sont ramenés au centre de tapis dans la même position relative qu’ils étaient au moment où ils sortaient (SONOMAMA ) et sont appelés à continuer le NEWAZA sans se remettre debout.

Vous pouvez sans doute vous apercevoir que, sur la base de ces règles, le travail au sol joue un rôle primordial. En effet, bien qu’il y ait quelques combats décidé par IPPON de NAGEWAZA ( projection ), la majeure partie de compétition sont décidées par IPPON par NEWAZA ou par deux WAZA-ARI si ce n’est pas un match nul. Sous ces règles, l’un des joueur, dès l’appel de HAJIME, souvent prend le revers du kimono de l’adversaire et se met à plat dos tout en essayant de l’emmener au sol. Souvent le combat au sol continue pendant des minutes. La durée de combat est normalement 6 minutes. Les arbitres ne déclarent normalement pas le MATE pour remettre les deux adversaires debout. Au contraire, lorsque les deux continuent la bataille acharnée au sol et sortent de l’aire de combat, les arbitres les ramènent au centre de tapis sans changer la position relative des combattants afin de les faire continuer au sol.
La continuité du NEWAZA cause parfois un match sans changement spectaculaire, ce qui peut être ennuyeux, mais on voit souvent des techniques superbes de renversement ou d’étranglement de l’adversaire à partir de la position sur le dos. Par ailleurs, une immobilisaton de 25 secondes donne un WAZA-ARI au sol, mais un seul WAZA-ARI n’est pas, comme l’on a vu, suffisant pour avoir une victoire. Les compétitions sous les règles de sept universités sont peut-êrte moins intéressantes aux yeux des spectateurs ordinaires qui souhaitent à voir des techniques de projection spectaculaires. Mais ceux qui aiment vraiment le NEWAZA trouvent ces combats très intéressants dans la mesure où les interactions, offensives et défensives sont subtiles entre les deux adversaires.

A mon avis, le développement de techniques de NEWAZA a connu un recul substantiel à cause des règles de jeux internationales actuelles, ainsi qu’à cause de la performance d’arbitres. Je veux dire que l’un des problèmes très sérieux est que les arbitres prononcent souvent le MATE de manière prématurée et trop fréquemment alors que les deux combattant sont en train de se battre au sol. Pour gagner l’IPPON par NEWAZA, il faut souvent du temps en ce sens que l’un des joueurs à l’offensive a besoin d’entrer dans la phase de préparation de l’OSAEKOMI( immobilisation ), ce qui nécessitera, par exemple, de contrôler l’épaule de l’adversaire solidement avant de faire sortir sa jambe prise par les jambes de l’adversaire. La déclaration prématurée de MATE empêche ce processus de préparation et consolidation de l’immobilisation et nuit ainsi au développement souhaitable du NEWAZA. Nombre de Judokas japonais pensent ainsi. Les règles devraient donc être modifiées et les arbitres entraînés de tel sorte qu’ils donnent une durée plus longue pour permettre les interactions au sol entre l’offensif et le défensif.

Bien entendu, le NEWAZA est une partie aussi importante et intégrale de Judo que le TACHIWAZA( technique de projection ). Il y a un grand nombre de techniques fantastiques de NEWAZA. Il existe même un bon nombre de techniques ésotériques qui ont été développées au cours du siècle par de grands maîtres ou pratiquants inconnus. Les techniques de NEWAZA sont très profondes. Il est regrettable que les efforts déployés pour explorer davantage ces techniques profondes de NEWAZA soient beacoup réduits, en arguant, de considérations commerciales, autour d’un Judo qui passerait plus spectaculaire aux yeux du public.
Il est temps pour la FIJ de réfléchir comment on pourra remédier à la situation actuelle de NEWAZA. Il y a des avis positifs et négatifs concernant les règles de compétition du tournoi des sept universités. Mais la manière de conduire ce championnat présente quelques matières de réflexion.