http://www.classmates.com/directory/public/memberprofile/list.htm?regId=8692739621Judo International: Voix du Japon par Gotaro Ogawa

Yamashita parle du judo d’aujourd’hui

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 Le judo continue à évoluer après Londres. La FIJ a publié les nouvelles règles pour l’Olympiade brésilienne. Ici au Japon l’affaire de violence au sein de l’équipe nationale féminine s’est divulguée, ce qui à entraîné la démission de M. Ryuji Sonoda, chef d’entraîneurs de l’équipe féminine, ainsi que M. Kazuo Yoshimura, entraîneur-en-chef de l’équipe japonaise. Monsieur Yoshihiro Yamashita, l’invincible champion, fait part ici de ses opinions sur le judo d’aujourd’hui.
 (Propos recueillis par Gotaro Ogawa, le 1er février, 2013)    

Le jury, c’est un grand problème
OGAWA: Après Londres, on est en présence de quelques développements au judo. Qu’en pensez-vous ?
YAMASHITA : Ce que j’ai trouvé comme problème le plus grave à Londres, c’était le jury. Le jury qui regardait la vidéo a trop fréquemment fait des interventions auprès des arbitres sur le tapis. Tout le monde, que ce soit les arbitres, combattants, coaches ou spectateurs, pensait que c’était affreux. Les arbitres sont des experts sélectionnés de première classe. Mais le jury est coupable de les avoir privé d’autorité et d’avoir suspendu souvent les combats d’importance. L’impulsion et la vigueur sont des éléments primordiaux dans les mouvements des combattants. Or le jury regardant la vidéo hors tatami ne les perçoit pas. Il lui est donc difficile de juger si le mouvement concerné vaut Ippon, Wazaari ou Yuko. Et le jury n’en est pas conscient. Le jury n’a pas le droit de causer une déception en arrêtant une compétition qui attire tous les regards enthousiastes. 
Bien qu’on n’ait pas vu ce cas à Londres, je crois savoir qu’il y a eu dans le passée des cas où le jury a déformé le jugement de l’arbitre afin de favoriser un combattant compatriote. Le jury doit connaitre ces problèmes.

Peu intéressant le judo sans kumite solide
YAMASHITA : Le deuxième problème que j’ai senti à Londres, c’est que souvent les combattants ne se saisissent pas bien, surtout les légers. Que c’était ennuyeux ! Par contre, les lourds ont montré un kumite satisfaisant, ce qui a pour résultat beacoup de Ippon. C’était bien. Il faut inventer des moyens de faire se saisir et les arbitres doivent conduire les adversaires à se saisir correctement..
OGAWA: La FIJ a fait un changement pour faire se saisir, mais à mon avis c’est  insuffisant. Il y a encore lieu de trouver des expédients ingénieux.
Pourtant, je voudrais dire que si l’arbitre donne des shidos fréquemment dans un délai court dans le but de faire se saisir; alors les combattants se hâtent et finissent par saisir d’une manière incomplète. Il faudrait accorder du temps nécessaire pour se saisir solidement.            
YAMASHITA  : Oui, il faut trouver un bon procédé pour faire se saisir solidement pour  un judo dynamique. 

Les nouvelles règles de la FIJ, suffisent-t-elles ?
OGAWA: Je vois quelques améliorations dans les nouvelles règles annoncées par la FIJ. Mais pour moi ce ne sont que des changements incomplets. Il y a d’autres points importants à réfléchir. Par exemple, la fréquence des tournois internationaux liée au système de classement est une question importante. Le régime actuel pèse trop sur les combattants. Il faut réfléchir à la gestion des championnats. Il est expliqué que les nouveaux changements ont pour but de rendre judo plus attirant. Dans ce contexte, je pense toujours qu’il y a trop de catégories de poids. Il vaut mieux élargir la différence de poids dans chaque catégorie pour démontrer qu’au judo le petit peut vaincre le grand. Un changement dans ce sens augmentera le charme du judo. Pour ce qui est de la courtoisie, la fédération mondiale a bien fait de faire saluer plus correctement au commencement de combat, mais n’a pas fait mention sur le rei à la fin de combat. Or la manque de courtoisie après le combat est un problème plus sérieux aujourd’hui. Le geste prodiguant des vainqueurs et la position de s’allonger immobile sur le dos des vaincus, c’es désagréable à voir. Ce doit être corrigé aussi.
YAMASHITA : Je pense qu’il est bon de réduire le nombre de catégories de poids. On peut penser à réexaminer le système actuel et élargir lentement la marge de chaque catégorie qui n’est que plus ou moins dix kilo. Pour compléter le nombre réduit de catégories, on pourrait ajouter une compétition par équipe.
Moi aussi, je suis mécontent de voir le manque du respect envers l’adversaire après le combat. Dans ces cas, il serait bon pour l’arbitre d’aller voir le coach dans le coach-box et de l’avertir. On demande aux arbitres de bien vouloir prendre l’initiative de faire respecter la courtoisie. Il est important que le judoka s’entraîne de sorte à garder le calme et de ne jamais se perdre dans toutes situations. Les gestes orgueilleux de vainqueurs et la position sur le dos de vaincus, cela n’est que le signe de se perdre. C’est le principe majeur du judo de respecter l’autre, que ce soit dans la situation de victoire ou de défaite. Il est regrettable que même quelques japonais y manquent.
OGAWA : La FIJ a raccourci le temps d’Osaë-komi. Certains disent que cette nouvelle règle aura pour effet d’encourager la volonté de travailler davantage au sol. Mais on peut penser aussi que le changement permettrait de gagner des points avec des techniques de newaza quelque peu lâches ou imparfaites, ou découragerait les efforts pour sortir d’immobilisation. Ce sera alors un problème.
YAMASHITA : Les judokas étrangers ont une tendance à abandonner dans un bref délai s’ils sont immobilisés. De ce point de vue, on peut comprendre le changement.

Manque de confiance entre l’entraîneur et l’élève au judo japonais
OGAWA: Je souhaite sincèrement voir des changements dans le milieu du judo japonais à la suite de l’incident de violence* au sein de l’équipe féminine. 
YAMASHITA : Cet incident récent montre qu’il manque la confiance entre les entraîneurs et les combattantes. Il est nécessaire que les entraîneurs, les garçons et les filles tous ensemble fassent des efforts, en tant qu’équipe du Japon, partageant le même esprit, le même sentiment. Il s’est avéré toutefois que ce n’était pas le cas. Je pense que jusqu’ici il a existé un conformisme avec tendance à protéger les amis placés dans le milieu du judo japonais. Il est dit aussi que le sens commun de nos judokas est une hétérodoxie de la société. Etant un membre de ce milieu, je me sens responsable de ce qui s’est passé.    
Le judo nippon a subi un dommage grave par cet incident mais je souhaite sincèrement que cette malheureuse affaire produira un tournant important pour que notre communauté s’ouvre au monde extérieur.

Le Judo existe pour la formation humaine et pour construire une meilleure société
YAMASHITA : Une caumunauté du judo ouverte où se rassemblent des gens pour faire des efforts ensemble en vue de se former et également pour contribuer à construire une meilleure société à travers le judo. Le judo doit exister en tant que tel. C’est la philosophie du Maître Jigoro Kano. Or, on ne peut pas nier qu’il y a plusieurs personnes au sein même du groupe dirigeant qui dévient de cet esprit. J’espère très sincèrement que le chef du Kodokan exerce du leadership pour revenir à ce point originel du judo.

Les dirigeants doivent s’efforcer assidûment pour se former
YAMASHITA : A propos du récent incident, certains disent que la pression constante pour gagner a causé des problèmes. Peut-être est-ce partiellement vrai.
On a vu une série d’incidents de châtiments corporels dans les clubs sportifs d’écoles. L’un a même causé le suicide d’un capitaine d’équipe de basket au Lycée de Sakuramiya. Je pense qu’une des causes importantes, c’est que tout en cherchant un résultat immédiat, on oublie le but fondamental de la formation à travers les sports. Moi, je souligne constamment qu’il n’y a nulle contradiction entre la poursuite du sommet du monde et la formation humaine. Quand j’étais entraîneur-en-chef de l’équipe nationale, j’ai cherché à former, non pas des combattants les plus forts, mais des combattants les meilleurs. Pour ce faire, il est important que nous, les entraîneurs nous nous efforcions assidûment à nous élever. Ces entraîneurs qui empruntent la violence, même s’ils ont de l’enthousiasme, manquent à leurs devoirs. Les leaders doivent constamment s’efforcer de se former et de mûrir.    

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(Note) Fin janvier, il s’est avéré qu’il y a eu des châtiments corporels durant les entraînements de l’équipe nationale féminine. M. Sonoda, l’entraîneur-en-chef de l’équipe, parmi d’autres, a démissionné.